Sortie en plein cœur de l’été, une étude risque de faire parler d’elle. En effet, l’institut européen Bruegel a publié les résultats de l’enquête menée par un économiste et un ingénieur d’Oxford. Leur constat est alarmant : 50% des emplois européens sont menacés par les ruptures technologiques dans les décennies qui viennent. Plongée dans les emplois du futur et dans le futur de l’emploi.
Ruptures technologiques : quel impact pour l’emploi ?
Cette étude pose que la part des emplois impactée par les évolutions technologiques pourrait varier entre 45 et 60% dans les états membres de l’Union Européenne. En France, le risque est estimé à 49,54% (Voir carte interactive).
Cet impact serait multi-facteur : l’automatisation de métiers peu qualifiés, l’augmentation de la puissance de calcul des programmes informatiques qui permettent d’automatiser des tâches humaines, la mutation de l’économie.
En effet, ayant subi une perte de son appareil productif industriel et ayant fait le choix de l’économie de l’intelligence, l’Europe semble menacée de déséquilibre social, ce qui pourrait toucher en premier lieu les salariés les moins qualifiés. Le phénomène s’accroit également par la pénurie récurrente de profils orientés vers les nouvelles technologies alors que le besoin des entreprises est croissant en la matière.
Le taux moyen de menace serait de 54% contre 45% aux États-Unis qui semblent mieux préparés à cette transition.
Au sein même des pays européens, les pays scandinaves tirent (encore) leur épingle du jeu : la part d’emplois menacée par les évolutions informatiques serait plus faible en Suède (46,69%) et au Royaume-Uni (47%). La France n’est d’ailleurs pas distanciée dans ce classement puisqu’avec les Pays-Bas elle reste en dessous du taux de 50%, dépassé par l’Allemagne (51%). Sans surprise, les pays les plus menacés du fait de leur retard technologique sont respectivement laRoumanie (62%), le Portugal (59%), puis la Croatie (58%) et la Bulgarie (56,5%).
Autant de transformations qui pourraient à terme favoriser des nouvelles formes d’emploi comme le portage salarial. En effet, les salariés s’orienteraient progressivement vers des formes plus autonomes, plus souples et plus adaptés à ces nouvelles compétences et ces nouvelles communautés de travail.
Des analyses convergentes : l’urgence d’une prise de conscience
Tous les spécialistes de l’emploi semblent s’accorder sur les conséquences sur l’emploi de l’émergence de processus d’intelligence artificielle et de la robotisation divise encore les spécialistes : le marché de l’emploi va changer. La question se pose désormais sur la rapidité de l’évolution et surtout sur la prise de conscience des pouvoirs publics.
Une nouvelle étude du Pew Research Center a publié le 6 août 2014 intitulée « AI, Robotics and the future of jobs ». Pour celle-ci, le Centre a interrogé près de 2000 experts du sujet. La question essentielle qui se posait était : la robotisation des processus industriels et des services créera-t-elle plus d’emplois qu’elle n’en détruira ? Le résultat est très partagé car près de 48% des répondants répondent que oui et 52% estiment que non (voir le détail de l’étude).
Deux conception s’affrontent logiquement. Les plus favorables estiment que l’intelligence humaine va se déplacer vers de nouveaux métiers, de nouveaux usages, de nouvelles façons d’utiliser des technologies et donc de nouvelles ressources. Ils s’appuient principalement sur le marché de l’emploi américain qui a su se redresser depuis plusieurs mois grâce aux géants de l’Internet et leur implantation Outre-Atlantique.
Pour les plus pessimistes, l’accélération est tellement rapide qu’un nombre important d’employés prendra du temps avant de retrouver un emploi. En effet, l’arrivée prochaine de nouveaux modèles autonomes de voitures, de l’utilisation de drones peuvent avoir des effets en cascade comme la menace de secteurs établis tels que le secteur de l’assurance, qui était basé sur une économie de la possession et non de l’usage. Dans cette nouvelle économie, une partie infime de travailleurs, de vrais experts pourrait s’en sortir mais la précarisation de la majorité pourrait également en découler : une disparition de la classe moyenne souvent évoquée.
Les systèmes publics d’éducation et de formation ne semblent donc vraiment pas adaptées à cette mutation en cours. Ainsi, l’économiste britannique Jeremy Bowles a déclaré « Les conclusions de ces estimations sont évidentes : si nous croyons que la technologie sera capable de surmonter les obstacles traditionnels dans le domaine des tâches cognitives non routinières, nous devons doter la prochaine génération de travailleurs de compétences qui leur permettent de tirer profit des technologies plutôt que d’être menacés par celles-ci ».
La France semble avoir récemment pris conscience de ce constat en proposant désormais à ses étudiants d’accéder à des cours de codage informatique dés l’école primaire. Cela suffira-t-il à pallier « l’inadéquation des compétences » décrite par l’Organisation internationale du travail et la pénurie de compétences dansles domaines IT régulièrement pointés par la Commission Européenne ?