Le trajet « domicile – travail » est souvent synonyme de galère pour de nombreux travailleurs français. Certains d’ailleurs passent plusieurs heures par jour dans les transports qui les mènent sur leur lieu de travail, singulièrement en Ile de France. Une décision de la Cour de Justice Européenne serait en passe de venir changer la donne pour certains de ces travailleurs. La Haute Cour a en effet décidé le jeudi 10 septembre que les déplacements des employés itinérants depuis et vers leur domicile devaient être comptés comme du temps de travail.
Le contexte d’une décision d’opportunité
Cette décision de la Cour européenne de justice intervient alors que le dossier présent sur son bureau l’invitait à se prononcer sur le cas de salariés de la société espagnole Tyco. La particularité de ces salariés reposait sur le fait que les techniciens chargés de l’installation de dispositifs de sécurité n’avaient plus de lieu de travail fixe depuis que l’entreprise a décidé de fermer ses bureaux. Par conséquent, les employés étaient dans l’obligation de passer leur journée sur la route.
Avant la décision de la juridiction européenne l’employeur considérait que les premiers et derniers déplacements pour rejoindre leur domicile étaient du temps de repos.
La juridiction européenne en a décidé autrement puisqu’elle a considéré que pour les travailleurs qui «n’ont pas de lieu de travail fixe ou habituel, le temps de déplacements que ces travailleurs consacrent aux déplacements quotidiens entre leur domicile et les sites du premier et du dernier client désignés par leur employeur constitue du temps de travail».
L’anticipation de la Cour de Justice européenne de l’évolution des modes de travail
Cette décision est d’une importance majeure à l’heure où notre économie est de plus en plus tournée vers les technologies et le numérique. Un nouveau paradigme managérial et organisationnel de nos entreprises semble en effet s’installer dans lequel il devient de plus en plus inutile pour certains acteurs de disposer de locaux pour accueillir leurs travailleurs.
Ce bouleversement dans les méthodes de travail, susceptible de toucher de nombreux domaines de notre économie, ne fera que s’accélérer dans les prochaines années.
Face à cette nouvelle donne, la Cour Européenne de justice a voulu se positionner dans l’anticipation pour dessiner un cadre adapté à de telles évolutions.
Si la décision de la Cour de Justice européenne est une avancée qu’il faut saluer, il reste cependant de nombreuses étapes pour que cette décision soit applicable à l’ensemble des entreprises ayant recours à des travailleurs itinérants. Il faudra par exemple commencer par fixer une définition précise de la notion de « travail itinérant » afin de définir le champ d’application de cette décision.
L’évolution des méthodes de travail de nos entreprises ne fera que s’accélérer dans les prochaines années. Pour répondre à ce changement et pour maintenir l’équilibre entre le besoin des employeurs de gagner en flexibilité et la nécessaire protection des salariés, notre droit devra opérer lui aussi de profonds changements.