Pour certains analystes, l’arrivée des nouvelles plateformes internet ou applications sur mobile entraînerait une réduction voire indubitablement la fin du salariat.
Cette relation entre Uber et le reste du monde – taxis, Etat, administrations, usagers – est encore une nouvelle illustration d’un nouveau modèle qui cristallise toutes les tensions.
Entre fatalisme, volonté d’accompagnement d’un phénomène de société irrémédiable ou encore réticence, l’Etat prend des pincettes pour essayer de juguler les différents enjeux.
C’est un nouvel épisode d’une longue série qui a récemment débuté avec l’Urssaf qui cherche à requalifier des autoentrepreneurs-chauffeurs en salariés.
Les organes de l’Etat à la place de la loi
Face à Uber, l’Etat est dans une situation embarrassante : il fait face à la colère des taxis qui détenaient le monopole sur ce secteur, tandis que les utilisateurs sont de plus en plus satisfaits de l’arrivée d’une nouvelle forme de concurrence à un prix abordable.
Pour beaucoup de spécialistes, sanctionner Uber reviendrait à renvoyer une image très négative de la France aux entrepreneurs de tous bords.
L’Etat a bien compris qu’une loi en tant que telle serait perçue comme un mauvais signal, alors il emprunte des chemins différents.
C’est notamment par la voie de la jurisprudence qu’il veut limiter le raz de marée numérique emportant avec lui les acquis du salariat. Les plus hautes juridictions françaises ont déjà eu à répondre à des affaires en soumettant la question du salariat face à l’économie numérique.
Le 11 novembre 2014, le Conseil d’Etat a visé le « travail dissimulé » comme pouvant justifier la fermeture d’une entreprise. Dans un arrêt du 6 mai 2015, la Cour de cassation estime que le statut d’autoentrepreneur est « fictif » si l’employé travaille dans le respect d’un planning quotidien ou s’il est assigné à un objectif de chiffre d’affaires. C’est dans cette brèche que l’Urssaf s’est engouffré.
L’Urssaf en contentieux ouvert avec Uber
L’Urssaf soutiennent que les chauffeurs Uber sont salariés et non pas autoentrepreneurs, ce qui pourrait n’être qu’un détail administratif cache en réalité des différences fondamentales en matière de business model pour Uber. Un salarié en terme de charges sociales coûterait beaucoup plus cher qu’un autoentrepreneur, Uber le sait et a déjà investi 100 millions de dollars pour arrêter l’action de groupe (class actions) qui lui était intenté aux Etats-Unis.
Le fait d’avoir mis un terme à la procédure sans en être arrivé au fond permet à Uber d’éviter une condamnation judiciaire pouvant amener beaucoup de pays à suivre cette voie.
Néanmoins, accepter de payer peut aussi signifier qu’Uber sait que son activité a des attributs de salariat difficilement réfutables.
En droit français, c’est la jurisprudence qui a dégagé 3 caractéristiques d’un contrat de travail :
- Une rémunération effective
- Un lien de subordination entre l’employeur et l’employé
- L’existence d’une rémunération
C’est sur ces trois conditions que l’Urssaf reprochent à Uber d’être un employeur, et c’est notamment sur le lien de subordination que la bataille promet d’être âpre.
L’Urssaf s’y est déjà préparé depuis des mois, et table sur 6 ans de procédure le temps d’arriver en cassation.
Malgré les difficultés de cette affaire et étant donné la bataille homérique qui se prépare entre l’organisme Urssaf et Uber, l’économie numérique apportera petit à petit des réponses juridiques car en matière d’économie collaborative « les faits précèdent le droit ».