La généralisation des outils numériques en entreprise et la multiplication des écrans dans la sphère privée ont une répercussion sur notre santé. L’étude réalisée par Cog’X et Lecko en juin 2023 met en lumière le phénomène de l’hyperconnexion en entreprise, identifiant 30% des salariés comme « hyperconnectés ». Depuis janvier 2017, la loi El Khomri du 8 août 2016, dite « loi Travail » encadre le droit à la déconnexion et a ainsi pour but de garantir au salarié un équilibre vie professionnelle/vie perso.
L’hyperconnexion, conséquence inévitable des nouveaux modes de travail ?
Selon une enquête récente menée par la Fondation April et BVA, un Français sur deux ne perçoit pas l’impact de l’exposition aux écrans sur sa santé globale. Cependant, les répercussions sur la santé sont loin d’être négligeables, affectant le sommeil, l’alimentation, l’activité physique, le stress, et la vision.
L’hyperconnexion, distincte de la cyberdépendance, se caractérise par un temps quotidien de consommation d’écran supérieur à 7h30, comme l’explique Alexis Peschard, addictologue et président du cabinet GAE conseil. Cette durée est largement dépassée par 10% des collaborateurs, en connexion continue avec leur entreprise, leurs collègues et leurs clients, en tout lieu et à toute heure, avec des risques notables pour leur santé physique et mentale principalement en raison d’une quantité excessive de mails et de réunions qui entraînent une surconsommation d’écran.
Dans ce contexte, l’hyperconnexion est souvent associée à la performance, bien que la réalité soit inverse selon l’addictologue. Ainsi, face aux défis du travail hybride et à la généralisation du télétravail, les entreprises sont appelées à mettre en place des mesures pour garantir la protection de la santé et le bien-être de leurs salariés pour éviter l’épuisement professionnel. De plus en plus de départements de Ressources Humaines (DRH) en entreprise se sont d’ailleurs emparés du sujet, désormais partie intégrante de la Qualité de Vie au Travail (QVT).
La pratique du télétravail et la nécessité de collaborer à l’international imposent également un volume conséquent d’informations à traiter, comme le souligne Cédric Blache, DRH du groupe Manutan France. Bien que le télétravail offre une flexibilité appréciable, il a également accru la porosité entre la vie professionnelle et privée, un constat partagé par Florence Oyon, Directrice des Ressources Humaines et du Développement Durable – BCW France. Le rapport Epos « workplace of the future » révèle d’ailleurs que seuls 43 % des employés sont satisfaits de l’équilibre entre leur vie professionnelle et leur vie privée, ce qui interpelle les entreprises sur la nécessité d’encadrer le temps de connexion.
Des entreprises lancent des initiatives innovantes
Soucieuse du bien-être de ses collaborateurs, BCW France a mis en place dès 2016 une charte garantissant une déconnexion effective le soir, le weekend et pendant les périodes de congés. Elle rappelle également le droit de ne pas répondre aux mails avant 8h30 ou après 20h et le weekend, limite la durée des réunions à 45 minutes et propose des actions de formation pour un usage raisonné des outils numériques. La réaffirmation de la nécessité des temps de pause est indispensable pour permettre une respiration, une ouverture au monde et ainsi favoriser la créativité, rappelle la DRH.
Pour Caroline Litzow, DRH de SpringFive, l’hyperconnexion, accentuée lors des périodes de télétravail, entraîne une démotivation particulièrement chez les plus jeunes collaborateurs. L’entreprise a donc élaboré un programme axé sur trois leviers (physique, psychologique, équilibre vie professionnelle et personnelle) et a formé ses collaborateurs à l’utilisation d’outils de communication pour encourager la prise de parole.
Manutan, de son côté, propose des outils techniques et informatiques, des conseils et des formations pour aider les collaborateurs à gérer leur temps en télétravail et prévenir la fatigue visuelle. Un « kit manager » a été lancé pour s’adapter au travail à distance, avec des ateliers de sensibilisation, des formations aux gestes et postures, des afterworks, des rencontres sur site et une enquête annuelle pour évaluer l’expérience en entreprise.
Onoff Business propose une application permettant aux salariés de distinguer vie professionnelle et privée en étant joignable uniquement sur certains horaires, comme le vante Justin de Baere, son Global Head of Marketing. Une initiative qui pourrait bien contribuer à protéger les collaborateurs des sollicitations intempestives et limiter l’hyperconnexion dans l’entreprise.
Comme de plus en plus d’entreprises, des sociétés de portage salarial participent à ces initiatives qui combinées à une prise de conscience collective, peuvent jouer un rôle crucial dans la limitation de l’hyperconnexion, contribuant ainsi à un environnement de travail plus sain et à une meilleure performance organisationnelle.