La négociation est un art subtil, essentiel notamment dans la vie professionnelle. Dans ce nouvel épisode du podcast du Lab, les génies du bien, Lionel Bellenger, expert en la matière et enseignant à HEC, partage son parcours et ses méthodes pour maîtriser l’art de la négociation. De la philosophie à la formation pour adultes, Lionel Bellenger nous explique comment il a développé son expertise unique en combinant rhétorique, psychologie et pragmatisme. Découvrez ses conseils pour éviter les pièges courants, développer une écoute active et atteindre des compromis réalistes.
Lionel Bellenger, un parcours dirigé par la passion de la rhétorique
Initialement passionné par l’enseignement, Lionel Bellenger commence sa carrière comme professeur de philosophie au lycée, où il enseigne pendant trois ans. Fasciné par la rhétorique et l’art de convaincre, il envisage un temps une carrière d’avocat ou de journaliste, mais son désir d’être dans l’action le pousse vers d’autres horizons. Dans les années 1970, il se tourne vers la formation pour adultes, un domaine en plein essor grâce à la loi de 1971 sur la formation continue. C’est là qu’il découvre l’importance de la prise de parole et de l’expression orale dans le milieu professionnel. Rapidement, il élargit son champ d’expertise à la négociation, où il combine ses connaissances en rhétorique avec des approches psychologiques et comportementales. Aujourd’hui, Lionel Bellenger enseigne la négociation à HEC et partage son savoir à travers de nombreux ouvrages –notamment un Que sais-je ? intitulé «La négociation»- et séminaires, aidant ainsi des professionnels à maîtriser l’art complexe de la négociation.
La négociation : plus qu’une simple discussion en 3 étapes
Une erreur commune consiste à confondre discussion et négociation. Dans une discussion, l’objectif est souvent de convaincre l’autre partie de son point de vue. En revanche, une négociation vise à obtenir l’adhésion de l’interlocuteur, ce qui implique un processus en 3 étapes : compréhension, persuasion et conclusion.
- Comprendre : cette phase consiste à consulter et à partager pour comprendre les intentions et les besoins de l’interlocuteur. Poser des questions pertinentes et écouter activement sont les bases de la négociation. Talleyrand disait, « On fait plus avancer une négociation avec une bonne question qu’avec un bon argument ».
- Convaincre : une fois les besoins compris, il s’agit de formuler une proposition et de convaincre l’autre partie de sa pertinence. Cela implique d’avancer des arguments solides et de savoir réfuter les objections.
- Concrétiser : la phase finale consiste à concrétiser l’accord. C’est l’équivalent du « closing » pour les vendeurs, où l’objectif est de finaliser les termes de l’accord.
L’importance de l’écoute et de l’empathie
L’écoute active est une compétence essentielle en négociation. Elle permet de comprendre réellement les besoins de l’autre partie et de montrer que l’on prend en compte ses préoccupations. Cependant, écouter ne suffit pas ; il faut également démontrer que l’on tient compte de ce qui a été dit, au moins en partie. Cela ne signifie pas accorder tout ce qui est demandé, mais faire des concessions intelligentes qui montrent une réelle volonté de compromis.
Lionel Bellenger met en avant plusieurs stratégies de négociation, adaptées aux contextes et aux objectifs spécifiques.
La négociation raisonnée (Win-Win)
Popularisée par les professeurs Fischer et Ury de Harvard, cette approche vise à ce que chaque partie ressorte satisfaite de l’accord. Elle repose sur quatre principes : séparer les personnes du problème, se concentrer sur les intérêts plutôt que sur les positions, inventer des options mutuellement bénéfiques et insister sur des critères objectifs. Bien que cette méthode soit idéalement positive, en favorisant des solutions créatives, des relations durables et une satisfaction accrue, Lionel Bellenger souligne que dans la réalité, la dimension de conflictualité rend cette approche souvent difficile à appliquer de manière équitable et efficace.
La réalité des compromis
Selon l’expert, il est plus réaliste de viser des compromis favorables plutôt que des accords parfaits. La négociation implique souvent des rapports de force et des contraintes qu’il faut savoir gérer pour arriver à des solutions viables pour les deux parties.
Les enjeux culturels
La négociation est également influencée par des facteurs culturels. Par exemple, les Américains perçoivent souvent les concessions comme une faiblesse, tandis que dans d’autres cultures, faire des concessions est vu comme un acte de respect et de stratégie. Comprendre ces nuances culturelles est essentiel pour réussir des négociations internationales.
Les pièges à éviter
Plusieurs pièges peuvent compromettre une négociation. Lionel Bellenger insiste sur l’importance de ne pas transformer une négociation en une simple discussion argumentative. En respectant les trois phases de la négociation, on évite des incompréhensions et des blocages.
Outre le piège qui consiste à ne pas faire la distinction entre discussion et négociation, ignorer les besoins de l’autre partie peut conduire à des propositions déconnectées des attentes réelles, ce qui entraîne frustration et échec de la négociation.
La négociation est un art complexe qui nécessite une combinaison de compétences en communication, en psychologie et en stratégie. Les clés du succès résident dans l’écoute active, la compréhension des enjeux culturels et la capacité à faire des compromis intelligents.
Pour les consultants, les formateurs et les professionnels indépendants, maîtriser l’art de la négociation peut transformer des interactions quotidiennes en opportunités de succès et de croissance. En intégrant ces principes et techniques, chacun peut devenir un négociateur plus habile et plus confiant.