L’intelligence artificielle (IA) a considérablement évolué au cours de la dernière décennie, avec des investissements mondiaux augmentant de près de 80 milliards de dollars annuels entre 2015 et 2022. Le marché mondial de l’IA est évalué à 327,5 milliards de dollars en août 2023 et McKinsey prévoit que l’IA ajoutera jusqu’à 4400 milliards de dollars de valeur à l’économie chaque année. D’ailleurs, l’adoption de l’IA par les entreprises a plus que doublé depuis 2017 (McKinsey) pour atteindre 55% en 2023. Décryptage des implications de cette révolution technologique pour les employés, les managers et les dirigeants.
Un levier d’efficacité opérationnelle pour tous
L’IA, en automatisant les tâches chronophages à faible valeur ajoutée, libère la créativité des employés et des managers. Elle facilite également la collecte et l’analyse des données, permettant aux managers de consacrer plus de temps à la relation avec leur équipe et à l’élaboration de nouvelles idées.
Selon le sondage “State of AI” (“L’état de l’IA”) réalisé par le CRM Hubspot en 2023, l’IA permet à 84 % des interrogés de gagner du temps sur les tâches “manuelles”.
Pour les leaders, l’IA offre des outils supplémentaires pour peaufiner leur stratégie. Cependant, Eliane Bacha, professeure associée et chercheure en management et en comportement organisationnel et leadership à Skema Business School, est catégorique : l’IA ne remplacera pas l’humain dans l’entreprise.
Pour les managers, la collaboration entre l’humain et l’IA est encore un territoire inexploré. Dans un monde VUCA (volatile, incertain, complexe et ambigu), exacerbé par la crise du Covid, les managers doivent être agiles, résilients et adaptables. Ils doivent également aider leurs équipes à maîtriser les outils de l’IA, en présentiel ou en télétravail, tout en étant conscients des biais cognitifs possibles.
L’IA, en analysant rapidement les données, aide à identifier des tendances et à évaluer la faisabilité des décisions. Dans un environnement en constante évolution, l’IA peut aider à s’adapter rapidement. Cependant, les bons managers et leaders sont ceux qui savent remettre en question leurs décisions.
Selon Eliane Bacha, l’IA, en particulier les IA génératives comme ChatGPT, peut produire des réponses convaincantes. Cependant, les objectifs des entreprises demeurent indépendants de l’IA.
L’IA et la prise de décision
Les organisations embauchent de plus en plus pour des rôles liés à l’IA, tels que les ingénieurs en apprentissage automatique et les scientifiques de données. De nouveaux rôles émergent également, comme l’ingénierie des prompts, en raison de l’adoption croissante de l’IA générative.
Les secteurs les plus susceptibles de bénéficier de l’IA générative sont ceux qui ont une forte intensité de données, une forte demande de créativité ou de personnalisation, et une faible automatisation actuelle, comme les médias, le commerce électronique, l’éducation, la santé, la fabrication et les services financiers.
L’IA peut utiliser des données historiques pour prédire des tendances futures, ce qui est particulièrement utile dans un environnement incertain. Par exemple, elle peut prévoir les fluctuations du marché ou les changements de comportement des consommateurs.
L’IA est également capable de traiter des systèmes complexes et d’identifier des modèles et des relations qui pourraient être difficiles à percevoir pour l’esprit humain. Ceci peut permettre aux décideurs de comprendre les multiples facettes d’une situation complexe.
De plus, grâce à des algorithmes d’apprentissage automatique, l’IA peut aider à clarifier les situations ambiguës en identifiant des modèles clairs à partir de données apparemment désordonnées.
Toutefois, il est essentiel de reconnaître que l’IA n’est pas exempte de biais. Biais de confirmation, de surajustement, de représentativité ou d’ancrage, ces biais peuvent provenir des données sur lesquelles l’IA a été formée ou de la manière dont les algorithmes ont été conçus.
L’IA générative et la génération de code
Avec les avancées de l’IA générative, il est désormais possible de générer du code ou d’apprendre l’informatique. Cependant, Eliane Bacha met en garde contre les risques de sécurité associés à ces codes. Il est essentiel que l’accès à certains outils soit restreint, disponibles uniquement aux bonnes personnes. Il est donc crucial que les entreprises contrôlent l’accès à ces applications. Les managers, les DSI et les directions générales doivent donc informer leurs équipes des avantages et des risques associés à ces outils générés par l’IA. Si au début, les départements des systèmes d’information (DSI) pouvaient avoir un pouvoir accru grâce à l’IA, ce pouvoir a vocation à diminuer à mesure que l’IA se généralise. Ce qui compte vraiment, c’est la vision stratégique du dirigeant.
La diffusion de l’IA dans les entreprises est un sujet qui fait débat. En effet, il existe une crainte parmi les travailleurs de perdre leur emploi à cause de l’IA générative.
Toutefois, ces technologies ne sont pas destinées à remplacer complètement la main-d’œuvre. Elles sont plutôt vues comme un moyen d’augmenter les capacités humaines, bien que certains métiers, en particulier ceux liés au service client à distance, soient plus susceptibles d’être automatisés.
D’après une enquête Hubspot, 60% des professionnels se disent d’ailleurs inquiets à l’idée que l’IA pourrait remplacer leur poste. Ce chiffre met en lumière la perception ambivalente de l’IA dans le monde du travail. 51 % des Français sont plus catégoriques et voient dans l’IA un danger pour l’humanité selon un sondage Cluster 17 et Le Point.
Il est donc important de réguler le développement de l’IA par des lignes directrices et des normes claires pour garantir que la technologie profite à la société dans son ensemble. L’IA générative nécessite des entreprises qu’elles fournissent une formation continue à leurs employés pour les aider à s’adapter à ces nouvelles technologies. Cela est crucial pour tirer le meilleur parti de l’IA et préparer les travailleurs aux évolutions inévitables de leur métier.