Spécialiste des sujets relatifs à l’entreprise, les transitions et la jeunesse depuis 2021, l’association Youth Forever s’est récemment penchée sur le rapport des jeunes au contrat de travail. L’étude, qui a été réalisée avec l’appui de 22 experts, met en évidence la nécessité de faire évoluer le contrat de travail. Jasmine Manet, directrice générale de l’association, a résumé les principaux enseignements de leur analyse.

Nécessaire modernisation du CDI, toujours très prisé

Même s’il est en perte de vitesse, le CDI (contrat à durée indéterminée) demeure le type de contrat le plus recherché parmi les 16 formes existantes en France. Il facilite en effet l’accès à des nécessités vitales, telles qu’un logement, un prêt bancaire, etc. Face à une conjoncture économique incertaine et à une précarité accrue, les jeunes générations accordent une importance particulière à la sécurité que procure le CDI.

Elles déplorent néanmoins le langage juridique complexe qui en rend la compréhension ardue. De plus, la relation de subordination leur semble dépassée, car la restriction à un emploi unique ne répond pas forcément à leurs aspirations.

Selon les experts, permettre à un jeune de multiplier les employeurs est un levier de fidélisation efficace.

D’autres attentes ont été mises en avant, comme la transparence de la grille de rémunération dans un souci d’équité, ou encore une aide au logement.

Sur certains de ces points, le contrat de portage semble mieux adapté.

Les indépendants bénéficient à la fois de l’autonomie de l’entrepreneuriat et de la sécurité du salariat. En parallèle, ils choisissent leurs clients et leurs missions suivant leurs aspirations et leurs compétences, ce qui leur permet d’élargir leur réseau.

Forte demande pour des contrats de travail plus flexibles et évolutifs

Ils reprochent également aux contrats de travail leur manque de souplesse, et leur mise à jour limitée à des moments précis (évaluation de performance annuelle, mobilité…) ou en cas de problèmes. Pour eux, ce système rigide ne s’adapte pas à l’évolution aux attentes des travailleurs et aux besoins des entreprises à long terme. Il en découle une forte demande pour des conventions plus dynamiques et évolutives, intégrant des notions de réciprocité, d’horizontalité et de renégociation.

Certains professionnels recommandent ainsi la mise en place d’un label visant à assurer la continuité des mesures de la loi Pacte (plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises), à l’échelle collective et individuelle.

Besoin de réinvention des syndicats traditionnels pour renouer avec les jeunes

Les syndicats traditionnels, en perte de connexion avec les jeunes, doivent se réinventer. L’émergence de nouveaux syndicats comme Printemps écologique est un signe encourageant, mais ces nouveaux arrivants restent rares. La génération Z, n’ayant pas connu les luttes collectives et leurs victoires, peine à comprendre le pouvoir et la nécessité de se regrouper dans la société. Les modèles entrepreneuriaux et associatifs modernes sont des sources d’inspiration pertinentes pour faire évoluer les instances de représentation.

Par ailleurs, la définition d’un nouveau dialogue social adapté aux enjeux contemporains s’impose comme une urgence afin de mieux servir les grandes transformations en cours. Cela implique sa simplification, sa localisation et sa sensibilisation aux enjeux contemporains en matière d’écologie, d’inclusivité et de participation.

Repenser le salariat pour une employabilité durable

Le contrat de travail doit permettre de préparer, de former et, si nécessaire, de transformer les missions confiées aux salariés sur le long terme.

Pour cela, une réflexion approfondie sur les clauses garantissant la sécurité en termes d’apprentissage, d’évolution et de projection professionnelle est nécessaire.

Il s’agit d’un défi majeur, que les entreprises doivent relever face à aux mutations rapides des métiers et des parcours de vie.

Pour favoriser une employabilité durable et inclusive, le concept même du salariat doit être remis en question. Dans ce but, l’expérimentation de dispositifs juridiques innovants est à envisager, en commençant par les clauses du contrat de travail, telles que salaire, avantages, localisation, rémunération, exclusivité… La réflexion s’étendra ensuite à l’ensemble de la chaîne de valeur, avec l’implication des différentes instances du droit du travail.