Dans le cadre du projet de loi de simplification que Bercy a présenté en Conseil des ministres le 24 avril dernier figure l’allègement de la fiche de paie. L’objectif est d’en améliorer la lisibilité et la compréhension pour les salariés. Toutefois, la nouvelle mouture ne remporte pas l’adhésion des sénateurs, dont certains dénoncent son caractère « politique » et sa complexité jugée accrue par rapport à la version existante. A noter, e projets de loi est à l’arrêt après la dissolution de l’Assemblée nationale le 9 juin dernier.
Les propositions de l’Exécutif pour simplifier le bulletin de paie
L’Exécutif a rassemblé une série de mesures techniques visant à réduire les contraintes administratives pour les entreprises et faciliter la vie de leurs dirigeants. Mais les salariés ne sont pas oubliés. Le gouvernement s’attaque également à la complexité du bulletin de paie, actuellement encombré d’environ 55 lignes.
Selon le ministère de l’Économie, cette complexité découle des multiples usages de ce document, qui sert à la fois d’attestation de revenu, de document de référence pour les contrôles et de support de communication entre l’employeur et le salarié.
D’ailleurs, un nouvel intitulé « montant net social » a été ajouté en juillet 2023 pour faciliter la déclaration des ressources pour la prime d’activité ou le RSA.
Le gouvernement souhaite en conséquence limiter le nombre de libellés à une trentaine, se concentrant sur les principaux composants de la rémunération. Par ailleurs, Bercy prévoir la mise en place, d’ici 2027, du « portail national des droits sociaux », une plateforme numérique centralisée qui permettra de consulter l’ensemble des informations nécessaires, éliminant ainsi le remplissage manuel des fiches de paie.
L’objectif est autant de rendre le bulletin plus clair et plus accessible, que d’en favoriser la dématérialisation et de réduire la charge pour les équipes RH.
Une intention noble, même si depuis 1998, plusieurs lois ou décrets ont échoué à apporter la simplification voulue pour ce
Bon à savoir : les mentions obligatoires concernent également le bulletin de salaire en portage salarial.
Critiques de la réforme au Sénat
Il reste que la proposition ne fait pas l’unanimité auprès des sénateurs, à qui le ministre de l’Économie et celle déléguée aux Entreprises l’ont récemment présentée. Les parlementaires de la Chambre haute ont notamment critiqué l’article 7, qui introduit un des principaux changements.
Concrètement, il s’agit de supprimer des informations jugées superflues ou obsolètes couvrant différents volets :
- la répartition des prélèvements sociaux par catégorie de risque (santé, retraite, chômage, etc.),
- les détails sur les contrats de prévoyance et de retraite complémentaire,
- les mentions relatives à la formation professionnelle, ou encore aux Tickets restaurant et titres de transport.
Seraient en revanche conservés les identités de l’employeur et du salarié, les rémunérations brute et nette de ce dernier, les cotisations et contributions sociales (patronales et salariales), ainsi que les congés payés et RTT.
Le dossier de presse d’avril présentait une « proposition d’évolution » avec une structure mettant en avant deux chiffres clés : le coût total pour l’employeur et le net à percevoir par le salarié. La version détaillée du bulletin de paie resterait accessible aux salariés sur demande.
Yves Bleunven (Union centriste, Morbihan), le rapporteur du projet, pointe du doigt une contradiction.
- D’une part, la démarche vise une simplification pour les salariés.
- De l’autre, elle impose aux employeurs une charge administrative supplémentaire en leur demandant de collecter, conserver et mettre à disposition des employés toutes les informations détaillées.
De son côté, l’élue LR de l’Aisne Pascale Gruny dénonce les coûts additionnels induits, notamment pour la maintenance informatique et les services d’un expert-comptable.
D’autres voix se sont élevées pour critiquer la présentation globale des cotisations. Raymonde Poncet Monge (écologiste, Rhône) redoute que cette approche ne prive d’une compréhension claire des risques couverts par les différentes cotisations.
Enfin, Fabien Gay (CRCE, Seine-Saint-Denis) suspecte une manœuvre visant à « rapprocher artificiellement » le salaire brut du salaire net, alimentant ainsi un discours politique sur le pouvoir d’achat. Il craint que cette simplification ne masque la réalité des contributions et ne desserve les intérêts des salariés.
Si le texte est adopté, en dépit des critiques, sa mise en œuvre ne se fera pas avant 2027, le temps que les éditeurs de logiciels adaptent leurs outils.