Ces dernières années, l’entrepreneuriat et le freelancing ont été largement valorisés, notamment sur les réseaux sociaux, comme des voies synonymes de liberté et d’accomplissement personnel. Pourtant, une part non négligeable des travailleurs indépendants finit par retourner vers le salariat, souvent par nécessité plus que par choix. Instabilité financière, charge mentale pesante, difficultés à séparer vie professionnelle et vie privée… autant de raisons qui poussent certains à abandonner leur statut d’indépendant pour retrouver un cadre plus stable.

 

Les raisons du retour au salariat : entre instabilité et épuisement

En 2022, 7 % des freelances souhaitaient activement redevenir salariés, tandis qu’un quart envisageaient cette possibilité. Si les raisons de ce revirement varient selon les profils, plusieurs tendances se dégagent.

L’instabilité financière, un facteur déterminant

L’une des principales difficultés des indépendants réside dans l’irrégularité de leurs revenus. Contrairement aux salariés qui perçoivent un salaire fixe chaque mois, les travailleurs à leur compte doivent gérer des fluctuations financières parfois brutales.

Même ceux qui gagnent bien leur vie en tant qu’indépendants peuvent ressentir une insécurité pesante. La pression d’être seul responsable de son activité et la précarité inhérente au statut d’indépendant peuvent devenir insupportables à la longue.

Une charge mentale difficile à supporter

Le freelancing est souvent présenté comme un mode de travail offrant une grande liberté. Pourtant, cette autonomie peut aussi se transformer en fardeau. En l’absence de hiérarchie et de structure imposée, la séparation entre vie professionnelle et vie privée devient floue.

 

Le portage salarial, une alternative méconnue

Entre l’indépendance totale et le retour au salariat classique, une solution hybride séduit de plus en plus de travailleurs autonomes en quête de stabilité : le portage salarial. Ce dispositif permet aux freelances de conserver leur autonomie tout en bénéficiant d’une couverture sociale similaire à celle d’un salarié (assurance chômage, retraite, mutuelle).

Concrètement, l’indépendant signe un contrat avec une entreprise de portage qui facture ses prestations aux clients et lui reverse un salaire, après déduction des charges et frais de gestion. Cela lui permet de sécuriser ses revenus tout en conservant la liberté de choisir ses missions et ses tarifs. Pour certains, cette solution constitue un compromis idéal : elle atténue les inconvénients du freelancing sans imposer les contraintes du salariat traditionnel.

 

Un retour pas toujours évident : le choc du salariat

Si le retour au salariat est souvent motivé par des raisons pratiques, il n’est pas sans difficultés. Certains le vivent même comme un échec personnel.

Une adaptation parfois compliquée

Les anciens indépendants possèdent généralement un esprit entrepreneurial marqué par l’autonomie, la proactivité et la prise d’initiative. Mais ces qualités, appréciées en théorie par les employeurs, ne sont pas toujours compatibles avec les processus rigides des entreprises.

Un sentiment d’échec pour certains, un soulagement pour d’autres

Le retour au salariat est parfois vécu comme un aveu d’échec. « Tout dépend du profil de l’indépendant », analyse Alain Fayolle, professeur à l’IDRAC Business School et spécialiste de l’entrepreneuriat. Selon lui, ceux qui sont devenus freelances par nécessité plutôt que par passion acceptent plus facilement de redevenir salariés. En revanche, pour ceux qui valorisent leur autonomie avant tout, ce retour peut être très difficile, voire temporaire.

Salariat, indépendance ou portage salarial : une question de priorités

Le débat entre salariat et indépendance est loin d’être tranché. Chacun de ces statuts comporte ses avantages et ses inconvénients, et le choix dépend avant tout des priorités personnelles et professionnelles de chacun.

Le salariat offre une stabilité financière, un cadre structuré et une meilleure séparation entre vie personnelle et professionnelle. Il peut être un refuge après une expérience entrepreneuriale difficile.

L’indépendance, quant à elle, permet une plus grande liberté, mais demande une discipline rigoureuse et une gestion constante des incertitudes financières.

Le portage salarial représente une alternative intéressante pour ceux qui souhaitent conjuguer autonomie et sécurité sociale. Ce statut permet aux indépendants de conserver leur liberté de mission tout en bénéficiant des avantages d’un salarié.

Finalement, le retour au salariat après une période d’indépendance n’est ni un échec ni une réussite en soi. Il s’agit simplement d’une adaptation aux besoins et aux contraintes de chaque individu à un moment donné de sa vie. Pour certains, la liberté d’entreprendre prime sur tout, quitte à accepter l’instabilité. Pour d’autres, la sécurité du salariat est un choix plus raisonnable et rassurant. D’autres encore trouvent dans le portage salarial un compromis leur permettant de profiter du meilleur des deux mondes. Dans tous les cas, l’essentiel est de trouver un équilibre qui permet de s’épanouir, que ce soit en entreprise, en freelance ou en portage salarial.