En 2024, la France a franchi un cap historique en matière de créations d’entreprises. Selon l’Insee, plus de 1,1 million de nouvelles sociétés ont été immatriculées au cours de l’année, soit une progression de 5,6 % par rapport à 2023. Ce dynamisme entrepreneurial, largement porté par le régime de la microentreprise, témoigne de la résilience des entrepreneurs français face aux incertitudes économiques et politiques. Toutefois, cette croissance ne doit pas occulter les fragilités structurelles du tissu productif hexagonal, marqué par un nombre record de défaillances d’entreprises.

 

Une forte croissance tirée par la microentreprise

Le moteur principal de cette hausse reste la microentreprise, un statut qui séduit de plus en plus grâce à sa simplicité administrative et fiscale. En hausse de 7,3 % sur l’année, les microentreprises représentent désormais 64 % des nouvelles immatriculations. Cette tendance s’inscrit dans une continuité observée depuis plusieurs années, où le régime simplifié attire aussi bien les indépendants que les salariés cherchant un revenu complémentaire.

 

Un profil d’entrepreneurs diversifié

Selon une enquête du Crédoc menée avec l’Urssaf Caisse nationale, le microentreprenariat demeure avant tout une activité de complément. Parmi les répondants :

  • 56 % cumulent cette activité avec un autre statut (salarié, étudiant, retraité, etc.),
  • 28 % sont salariés,
  • 16 % sont demandeurs d’emploi,
  • 8 % sont retraités ou en formation.

Le chiffre d’affaires moyen des microentrepreneurs reste relativement modeste : 34.400 euros annuels pour 89 % des entrepreneurs interrogés en 2022, avec un revenu net moyen de 7.500 euros par an. Cette situation explique pourquoi deux tiers des microentrepreneurs ne souhaitent pas développer davantage leur activité, ce qui fragilise la pérennité de ces structures.

 

Un taux de survie faible

Malgré leur succès au démarrage, les microentreprises souffrent d’une forte volatilité. Cinq ans après leur immatriculation, seul un tiers d’entre elles sont encore en activité. Cette précarité s’explique par plusieurs facteurs :

  • Une dépendance aux plateformes numériques (notamment dans la livraison ou les services à la demande),
  • Une rentabilité parfois trop faible pour assurer un revenu décent,
  • Des charges et cotisations sociales qui peuvent peser sur le modèle économique.

 

Les secteurs en plein essor en 2024

Si la dynamique entrepreneuriale a concerné presque tous les secteurs, certaines activités ont particulièrement bénéficié d’un engouement :

Transport et entreposage (+25 %)

L’essor des services de livraison, notamment la livraison de repas à domicile, a largement contribué à cette croissance. La demande toujours forte pour ces services a poussé de nombreux entrepreneurs à se lancer dans ce secteur, souvent sous le régime de la microentreprise.

 

Industrie (+12 %) : un effet de la réindustrialisation ?

Dans un contexte de volonté politique de réindustrialisation, le secteur industriel a connu une progression notable. L’augmentation des créations d’entreprises dans ce domaine témoigne d’un regain d’intérêt pour la production locale et l’innovation industrielle.

 

Hébergement et restauration (+12,4 %)

Malgré un climat économique incertain, la reprise du tourisme et l’attrait pour la restauration ont soutenu les créations d’entreprises dans ce secteur.

 

Immobilier (-5 %) : victime de la crise du logement

Contrairement aux secteurs en croissance, les créations d’entreprises dans l’immobilier ont reculé de près de 5 %, un effet direct de la crise du logement qui freine les investissements et les nouvelles initiatives entrepreneuriales dans ce domaine.

 

Un dynamisme entrepreneurial contrasté par un record de défaillances

Si la création d’entreprises atteint des sommets, l’envers du décor est plus préoccupant. 2024 a également été marquée par un nombre record de faillites. Selon la Banque de France, près de 66.000 procédures collectives ont été ouvertes, un chiffre en forte hausse qui pourrait encore augmenter dans les mois à venir.

Autre indicateur préoccupant : 310.000 entreprises ont été radiées en 2024, soit une hausse de 9 % par rapport à l’année précédente. Les secteurs les plus touchés par ces radiations sont :

  • Le commerce,
  • Le conseil et les services aux entreprises,
  • L’immobilier.

Néanmoins, l’attractivité du régime de la microentreprise pourrait être remise en question si la réforme concernant la réduction du seuil d’exonération de la TVA de 37 500 à 25 000 euros venait à entrer en vigueur.

Pour que cette vague entrepreneuriale se transforme en moteur durable de croissance, il sera essentiel au contraire de renforcer l’accompagnement des créateurs d’entreprise, d’encourager l’innovation et la diversification des modèles économiques, et d’adapter les régulations pour assurer un équilibre entre simplicité administrative et protection des entrepreneurs.