Après l’ordonnance prise par le Gouvernement le 2 avril dernier, François Rebsamen, Ministre du Travail et de l’Emploi a présenté le mercredi 19 août dernier le projet de loi qui devrait ratifier cette ordonnance globale sur le portage.
Nouvelle étape pour l’encadrement et sécurisation du portage salarial
L’ordonnance du 2 avril 2015 constitue un tournant pour le portage salarial en France, un modèle d’emploi permettant à des professionnels autonomes d’exercer leur activité tout en bénéficiant des avantages du statut salarié. Elle établit un cadre légal structuré et précis pour réguler les relations entre le salarié porté, l’entreprise de portage salarial, et l’entreprise cliente, tout en assurant la sécurité juridique des parties prenantes.
Contexte et genèse de l’ordonnance
Avant l’adoption de cette ordonnance, les pratiques liées au portage salarial étaient peu encadrées. Face à l’évolution du marché du travail et à la montée en puissance du travail indépendant, une concertation entre les pouvoirs publics et les partenaires sociaux a été organisée. Cette démarche participative a permis de mieux cerner les besoins et les attentes des acteurs concernés, favorisant ainsi la mise en place d’un cadre équilibré. Ce texte vise à protéger les salariés portés tout en encadrant les pratiques des entreprises du secteur et en répondant aux besoins des entreprises clientes.
Introduction des contrats spécifiques au portage salarial
L’un des apports majeurs de l’ordonnance de 2015 est la clarification des modalités contractuelles dans le portage salarial. Désormais, les entreprises de portage et les salariés portés peuvent conclure des Contrats à Durée Déterminée (CDD) ou des Contrats à Durée Indéterminée (CDI) spécifiquement adaptés à cette activité. Ces contrats incluent des mentions spécifiques telles que le domaine d’expertise du salarié ou les modalités de rémunération. Une particularité réside dans le fait que l’entreprise de portage n’est pas obligée de garantir un volume de travail ou de rémunération pendant les périodes d’intermission, c’est-à-dire en l’absence de mission.
De plus, l’ordonnance encadre également le contrat commercial entre l’entreprise de portage et l’entreprise cliente. Ce contrat doit inclure des informations comme le prix négocié par le salarié et les conditions de travail applicables dans l’entreprise cliente, garantissant ainsi une transparence accrue.
Conditions d’accès et critères pour devenir salarié porté
Un autre aspect fondamental de l’ordonnance est l’élargissement des critères d’éligibilité au portage salarial. Initialement réservé aux cadres, ce mode d’emploi est désormais ouvert à toute personne justifiant d’une expertise, d’une qualification et d’une autonomie suffisante pour rechercher elle-même ses missions. Le professionnel doit être capable de négocier avec ses clients les conditions de réalisation de ses prestations, y compris le prix.
En outre, l’ordonnance abaisse le seuil minimum de rémunération des salariés portés à 75 % de la valeur mensuelle du plafond de la Sécurité sociale, soit environ 2 483 euros en 2018 pour une activité à temps plein. Cette mesure rend le portage salarial plus accessible, notamment pour les professionnels qui, auparavant, ne remplissaient pas les conditions financières.
Encadrement du recours au portage salarial par les entreprises clientes
Pour les entreprises clientes, l’ordonnance précise les conditions dans lesquelles elles peuvent faire appel au portage salarial. Ce dispositif peut être utilisé pour des missions ponctuelles, notamment lorsque l’entreprise a besoin d’une expertise temporaire qu’elle ne possède pas en interne. Toutefois, des restrictions s’appliquent, interdisant par exemple de recourir au portage pour remplacer un salarié en grève ou pour exécuter des tâches particulièrement dangereuses. La durée maximale de chaque prestation est par ailleurs fixée à 36 mois, renforçant la sécurité des missions.
Renforcement des obligations des entreprises de portage salarial
L’ordonnance impose aux entreprises de portage salarial d’exercer cette activité de manière exclusive. Elles ne peuvent donc pas diversifier leur activité avec d’autres prestations commerciales. En outre, ces entreprises ont l’obligation de mettre en place un compte d’activité pour chaque salarié porté, permettant de suivre les flux financiers liés aux missions : paiements reçus des clients, frais de gestion, rémunération nette, etc.
Enfin, pour garantir les droits des salariés portés, les entreprises de portage doivent disposer d’une garantie financière. Celle-ci assure, en cas de défaillance de l’entreprise, le paiement des salaires et des cotisations sociales des salariés.
Conclusion
L’ordonnance du 2 avril 2015 a permis de formaliser le portage salarial en France, offrant un cadre juridique sécurisé tant pour les salariés que pour les entreprises de portage et les entreprises clientes. Grâce à cette réglementation, le portage salarial s’affirme comme une solution d’emploi flexible et adaptée à une économie en constante évolution, répondant aux besoins croissants d’autonomie des professionnels tout en préservant leurs droits sociaux.